Agradecemos a www.tamazgha.fr así como al autor, Aksil Azergui, el permiso para la publicación de esta versión extractada del artículo original que pueden leer aquí.
Depuis la France, où il séjournait au moment de ce séisme dévastateur, l’un des plus violents de l’histoire du Maroc, le monarque marocain s’est exprimé le 9 septembre au soir, à travers un communiqué officiel dans lequel il décrétait trois jours de deuil et ordonnait le déploiement d’un programme d’urgence pour venir en aide aux victimes, a rapporté Courrier International (11/09).
A ce jour, ni le monarque marocain ni son premier ministre, invisible sur le terrain, n’ont pas daigné se prononcer publiquement sur ce séisme. Des messages qui pourraient rassurer les victimes. (…) Sur le terrain, les limites de l’intervention des autorités se sont faites sentir dès les premiers jours. Ce qui a permis de sauver des vies c’est d’abord la solidarité des habitants des régions touchées, privées des premiers secours, et par la suite ceux des autres régions qui se sont mobilisés pour porter l’aide nécessaire aux victimes.
La raison de l’immobilisme du gouvernement trouve son origine dans le silence de Mohamed VI. (…) Les officiels n’oseront jamais se rendre sur les lieux du drame avant le roi.
Brouksy explique que le silence du roi « qui peut choquer à l’international, n’est pas vraiment étonnant : c’est quelque chose que nous avons déjà vécu au Maroc. Soulignons d’ailleurs que le roi n’a pas vraiment pris la parole (…). Il n’est pas non plus intervenu à la télévision, et ne s’est donc pas vraiment «adressé» aux Marocains. En conséquence de cela – et cela peut sembler étrange en France – aucun responsable politique n’a pris la parole. » (La Dépêche du 12/09). (…)
Déjà en 2004, suite au séisme de Biya (El Houceima) qui a provoqué 600 morts, le roi ne s’est déplacé sur les lieux que quatre jours après le tremblement de terre. Ce déplacement tardif a provoqué la colère des habitants par ce qu’il a retardé l’intervention des secours. (…) Ce n’est qu’après ce déplacement royal que le gouvernement a commencé à communiquer. L’action des autorités est suspendue à la parole royale. Le roi est le seul décisionnaire, le chef d’orchestre.
Lors de ce dernier séisme, celui du Haut-Atlas, le roi était «l’absent omniprésent», souligne le quotidien français Libération (12/09) qui fustige un gouvernement silencieux et désincarné. Le premier ministre Aziz Akhanouch, s’est contenté de publier le samedi 10 septembre un tweet dans lequel il présente ses condoléances aux victimes.
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Alors que les ministres marocains se sont effacés du paysage, leurs concitoyens portaient secours aux sinistrés, creusaient des tombes pour inhumer les victimes, portaient secours aux personnes bloquées sous les décombres. Même l’ambassadeur d’Israël s’est aventuré dans les ruines du quartier Mellah à Marrakech pour constater les dégâts. L’ambassade d’Israël a publié les images de cette opération de communication. (…)Lorsque Mohamed VI a daigné se déplacer, c’était pour aller au CHU de Marrakech, la ville la moins touchée par le séisme. Après sa visite éclair qui n’a duré au total que 8 heures, il a rejoint Rabat avant de se rendre à Tétouan dans le nord, le 21 septembre, pour prolonger ses vacances (El Confidencial (23/09). (…)
«Miracles», charlatanisme et racisme
Si certains ont annoncé sur X (ex-Twitter), dès les premières heures, que si ce séisme a frappé les régions de Marrakech et d’Agadir c’est parce que la prostitution y règne, d’autres ont considéré le séisme comme faisant partie des «soldats d’allah» utilisés pour châtier «les infidèles».
Par ailleurs, des messages faisant la promotion de «miracles» survenus dans les régions frappées par le tremblement de terre ont fleuri. On diffuse, par exemple, des images de sources d’eau qui jaillissent des montagnes fissurées, ce qui est très normal.
Le message le plus fantaisiste prétend que les personnes gravement blessées qui ont bénéficié d’une transfusion du sang du roi se sont mis debout juste après et ont marché. Traduction d’un tweet : « SM le roi a fait don de son sang béni. Toute personne à qui une goutte de ce sang est injectée est guérie immédiatement. J’ai vu cela de mes propres yeux. Plusieurs blessés ont quitté leurs lits comme s’ils n’avaient jamais été malades ».
D’autres se sont déchaînés sur Facebook en publiant des post racistes appelant «les arabes» à ne pas soutenir les «chleuhs désormais sur le gril» et à les «laisser crever de faim».
Mépris
La gestion de cette catastrophe par les autorités marocaines n’a pas été rassurante. Elle a empêché les secours d’intervenir rapidement. Dans les villages, on a interdit aux habitants d’inhumer les victimes avant que leurs dépouilles ne soient examinées et comptées par les autorités «compétentes». Les cadavres pourrissaient à l’air libre et sous les décombres. Le quotidien Le Monde (14/09) parle d’une organisation chaotique des secours. Il précise que plusieurs villages sont toujours inaccessibles, seulement ravitaillés par un hélicoptère de l’armée qui largue régulièrement nourriture et bidons d’eau. Ce largage sauvage est effectué sans respect des procédures habituelles. Les vivres sont chargés dans des sacs traditionnels et jetés sans parachute. Au contact du sol, les aliments éclatent et sont rendus impropres à la consommation. Des vidéos diffusées par les habitants sur les réseaux sociaux montrent les vivres «parachutés». Du pain sec, des sardines et du fromage que les habitants ont choisi de ne pas manger. Malgré la communication rouillée distillée par les médias officiels et une myriade de sites internet gérés par les services de renseignement, la situation sur le terrain est toujours chaotique. L’hiver, rude sur les cimes, risque de la compliquer davantage.
L’humanitaire, otage du jeu diplomatique
Quelques heures seulement après le séisme, plusieurs pays et organisations humanitaires ont proposé leur aide aux autorités marocaines. Le Maroc a fait fine bouche sur le choix des aides. Rabat a privilégié les alliés ayant reconnu sa souveraineté sur le Sahara Occidental et rejeté l’aide de plusieurs pays possédant plus d’expertise et surtout de moyens dans la gestion de ce genre de situations, comme la France, au profit de pays comme les Emirats Arabes Unis et le Qatar qui brillent par leur absence d’expertise et d’expérience. L’Espagne et le Royaume-Uni sont les seuls pays européens autorisés à intervenir. L’Express (14/09) affirme que le refus de l’aide française est «un geste politique calculé au millimètre».
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Plusieurs ONG israéliennes n’ont pas attendu le feu vert des autorités marocaines. Elles sont intervenues sur les lieux dès les premiers jours (Le Monde du 13/09). Parmi ces organisations, on dénombre Sauveteurs sans frontières, United Hatzalah et IsraAid. Ces ONG ont publié des photographies sur les réseaux sociaux montrant leurs secouristes dans plusieurs villages amazighs de l’Atlas. Certaines ONG françaises sont intervenues. Leurs membres ont été forcés d’enlever les insignes permettant d’identifier leur nationalité et leur affiliation.
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La France, un pays ami qu’on aime détester
Une compagne médiatique nauséabonde a été lancée par des «médias» marocains aux ordres contre la France qui, rappelons-le, était parmi les premiers pays à proposer son aide au Maroc. Une aide bienvenue et salutaire si ce n’est l’opposition du roi. Ce dernier, rappelons-le, séjournait en France au moment du séisme.
La décision d’exclure la France a été prise en hauts lieux à cause d’une «colère royale». À L’origine de cette fâcherie, une communication téléphonique entre le président français Emmanuel Macron et Mohamed VI suite à la révélation de l’utilisation par les services marocains du logiciel israélien Pegasus pour espionner les téléphones de plusieurs hommes politiques français, dont le téléphone personnel du président de la république. Mohamed VI aurait donné «sa parole d’honneur» au président français qu’il n’a pas été espionné par les services marocains. Ce dernier lui aurait rétorqué qu’il ne faisait confiance qu’aux services français qui ont confirmé cet acte d’espionnage. Il paraît que «la parole d’honneur» du monarque marocain ne valait pas un clou. C’est un commis du régime marocain, l’écrivain Tahar Ben Jelloun, qui révèle cet « incident » à la télévision israélienne I24.
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SNPM, un chien de garde du régime
En réaction à la couverture médiatique consacrée à cette tragédie, le Syndicat national de la presse marocaine (SNPM) a publié deux communiqués hostiles aux médias français qu’il accuse de «ne pas respecter la déontologie journalistique», les accusant de mener une «campagne politique haineuse pour servir certains objectifs…».
Le SNPM a par la suite exprimé, dans un deuxième communiqué, «sa ferme condamnation de l’horrible acte criminel commis» par Charlie Hebdo «à travers l’insulte directe» au monarque marocain. Depuis quand caricaturer est un «acte criminel» ?
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Mercredi 20 septembre, deux journalistes français de Mariane Hebdo ont été arrêtés à Casablanca et expulsés du Maroc. Ils ont été appréhendés, dans leur hôtel, par 10 agents des services de renseignement, amenés dans un commissariat et forcés à quitter le pays. Ils enquêtaient sur plusieurs affaires au Maroc. Le ministère des affaires étrangères a expliqué que ces journalistes n’avaient pas d’autorisation pour travailler dans le pays. (…)
Je rappelle que ce syndicat n’a publié aucun communiqué de solidarité et n’a défendu aucun des journalistes qui purgent de lourdes peines de prison pour des crimes imaginaires qu’ils auraient commis, à savoir des «viols» ou même de «l’intelligence avec des puissances étrangères». Drôle de syndicat.
Tamazight, une langue de non-communication
Ce séisme a fait émerger à la surface, entre autres, le statut officiel de la langue amazighe.
«La communication en tamazight empêche les opérations de secours et de prise en charge psychologique des victimes du séisme» est le titre d’un article publié, en arabe, par le site Hespress (13/09). «La communication en tamazight» a été mise entre guillemets comme si on ne peut pas communiquer dans cette langue profane. Le site fait semblant de découvrir qu’il existe des régions entières où les habitants ne parlent pas l’arabe.
L’article explique que les médecins et les psychologues font recours à des interprètes pour communiquer avec les victimes et que la plupart des habitants de cette région ne parlent ni l’arabe dialectal ni l’arabe classique.
L’usage de tamazight, s’aventure l’auteur, est susceptible de mettre la vie des habitants en danger par ce que ces derniers ne comprennent pas les consignes de sécurité dictées en arabe classique.
Pour survivre, il faut parler l’arabe dans un pays dans lequel tamazight, nous dit-on, est langue officielle. Les habitants sont doublement victimes. Non seulement du séisme qui a frappé leurs villages, mais aussi de la négation de leur langue qu’ils croyaient respectée et même enseignée.
Sur un réseau social, une psychologue écrit qu’elle avait les larmes aux yeux en découvrant que les sinistrés ne parlaient pas l’arabe. La citadine bobo venue aider s’est retrouvée sans aucune utilité par ce qu’elle a oublié d’apprendre tamazight. Imazighen devraient-ils apprendre la langue arabe pour qu’ils puissent être secourus ?
Et pourquoi l’État marocain n’impose-t-il pas aux médecins, psychologues, secouristes et autres agents de l’État d’apprendre tamazight pour qu’ils puissent être pleinement opérationnels ? Elle est bien une langue officielle de la monarchie. C’est en vérité la communication en arabe (dialectal ou classique) qui empêche les opérations de secours et de prise en charge psychologique des victimes de ce séisme.
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